AIRBNB reconnue responsable de l’activité illicite exercée par ses hôtes, et condamnée.

AIRBNB reconnue responsable de l’activité illicite exercée par ses hôtes, et condamnée.

Véritable bombe pour les plateformes publiant les annonces de logement pour une courte durée : Airbnb a été reconnue comme éditeur, et non simple hébergeur, des contenus déposés sur son site.

Une propriétaire a vu son logement sous-loué par sa locataire sans autorisation sur la plateforme Airbnb pendant 534 jours, ce qui a permis à la locataire d’encaisser la somme de 51.936,61 €.

Le Tribunal judiciaire de PARIS, aux termes de son jugement rendu le 5 juin 2020 précise :

« L’ensemble de ces éléments témoigne du caractère actif de la démarche de la société AIRBNB dans la mise en relation des hôtes et des voyageurs et de son immiscion dans le contenu déposé par les hôtes sur sa plate-forme.

 Il est dès lors établi que la société AIRBNB n’exerce pas une simple activité d’hébergement à l’égard des hôtes qui ont recours à son site mais une activité d’éditeur.

Dès lors que l’hôte exerce une activité illicite par son intermédiaire, compte tenu de son droit de regard sur le contenu des annonces et des activités réalisées par son intermédiaire en qualité d’éditeur, elle commet une faute en s’abstenant de toute vérification, laquelle concourt au préjudice subi par le propriétaire. »

Airbnb est condamnée à payer à la propriétaire à titre de dommages et intérêts la somme de 51.936,61 € correspondant aux sous-loyers encaissés par la locataire ainsi que 1.558,20 € correspondant aux commissions perçues par la plateforme.

Airbnb doit donc opérer un contrôle a priori et non seulement a posteriori, de la légalité des annonces publiées sur son site.

A défaut, elle sera responsable, comme a priori les autres plateformes publiant des annonces de location en meublé touristique dite location saisonnière, des actes commis par ses utilisateurs et devra répondre des agissements illicites de ceux-ci sur la plateforme.

Covid-19 et perte d’exploitation : restaurateurs vs Axa, épisodes 2 et 3

Covid-19 et perte d’exploitation : restaurateurs vs Axa, épisodes 2 et 3

J’ai récemment invité, dans un précédent article, les professionnels, et notamment les restaurateurs, à interroger leur assureur professionnel et à déclarer un sinistre au titre de la garantie perte d’exploitation qui serait incluse dans leur contrat d’assurance multirisques professionnel.

Episode 1 :

Il est rappelé que le 22 mai 2020, le Tribunal de commerce de PARIS a répondu favorablement à la demande de condamnation de l’assureur à payer une somme provisionnelle au titre de la perte d’exploitation d’un restaurateur, à hauteur de 45.000 €, et a désigné un expert ayant pour mission d’évaluer le montant des dommages résultant de la perte de marge brute ainsi que celui relatif aux frais supplémentaires d’exploitation sur la période de fermeture administrative du restaurant.

Episode 2 :

C’est au tour du Tribunal de commerce de de LYON, saisi en référé, de s’être prononcé le 10 juin 2020.

Les conditions particulières du contrat, souscrit par le restaurateur exerçant dans le Beaujolais auprès d’Axa, prévoient :

« Perte d’exploitation suite à fermeture administrative

La garantie est étendue aux pertes d’exploitation consécutives à la fermeture provisoire totale ou partielle de l’établissement assuré, lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

  1. La décision de fermeture a été prise par une autorité administrative compétente, et extérieure à vous-même,
  2. La décision de fermeture est la conséquence d’une maladie contagieuse, d’un meurtre, d’un suicide, d’une épidémie ou d’une intoxication. »

L’assureur a limité la portée de l’exigibilité de la clause « perte d’exploitation » en ajoutant l’exclusion suivante :

« les pertes d’exploitation, lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, qu’elle que soit sa nature et son activité, fait l’objet, sur le même territoire départemental, que celui de l’établissement assuré, d’une mesure administrative, pour une cause identique ».

Le restaurateur estimait que l’exclusion consistait en une clause abusive et devant être considérée comme non-écrite ; les parties se sont également opposées sur les définitions des termes épidémie ou pandémie.

Le juge des référés a à juste titre relevé que l’utilisation du terme épidémie incluait celui de pandémie.

Il a rappelé :

  • que ses pouvoirs juridictionnels lui permettaient de faire application d’un contrat mais pas de l’interpréter et, qu’il pouvait considérer une clause comme non-écrite uniquement si cet élément était non sérieusement contestable,
  • que pour faire droit aux demandes du restaurateur, il serait nécessaire de relever qu’il est non sérieusement contestable que la clause d’exclusion vide de sa substance la clause de garantie, autrement dit qu’elle prive la garantie de l’essentiel recherché par le souscripteur.

Le magistrat a ainsi considéré :

« l’hypothèse d’une fermeture administrative circonscrite à un seul établissement n’est pas totalement inconcevable en début ou en fin d’épidémie lorsque des regroupements de cas, dits clusters, naissent. »

« l’exclusion n’étant pas totale et illimitée, il convient d’analyser si l’essentiel de l’obligation a été retirée ; que ce pouvoir n’appartient pas au juge des référés mais au juge du fond. »

Le restaurateur a donc été débouté et l’affaire a été renvoyée au fond à l’audience du Tribunal du 1er juillet 2020.

Cette décision semble logique au vu du cas d’espèce et il reviendra au juge du fond de trancher le litige.

L’ordonnance est disponible au lien ci-dessous.

https://www.linkedin.com/posts/gtclyon_ordonnance-r%C3%A9f%C3%A9r%C3%A9-pertes-exploitation-covid-activity-6676379632972902401-a1Bi

Episode 3 :

Le Tribunal de commerce de BORDEAUX a lui aussi été saisi en référé à la requête d’un restaurateur à l’encontre de la compagnie Axa.

L’assureur a refusé sa garantie au motif que « sont exclues de la garantie les pertes d’exploitation lorsqu’à la date de la fermeture, au moins un établissement (…) fait l’objet, (…) d’une mesure de fermeture administrative pour une cause identique » et ce, dans le même département.

Il semble donc que les faits d’espèce soient les mêmes que ceux présentés au juge lyonnais.

La décision sera rendue le 23 juin et tout porte à croire que le juge des référés, tout comme celui de LYON, se déclarera incompétent au profit du juge du fond.

La saga ne fait que commencer et nous attendons l’épisode 4.

Affaire Olympique Lyonnais c/ LFP et saison 2019-2020 : classement de la Ligue 1 entériné

Affaire Olympique Lyonnais c/ LFP et saison 2019-2020 : classement de la Ligue 1 entériné

Le 30 avril 2020, lors de sa réunion téléphonique, le conseil d’administration de la Ligue de football professionnel (LFP) a mis fin à la saison 2019-2020 et enregistré le classement du championnat de Ligue 1 sur la base d’un quotient tenant compte du nombre de points obtenus et du nombre de rencontres disputées par les équipes.

C’est cette décision qui a été contestée par l’OLYMPIQUE LYONNAIS (SA et SASU), qui espérait une reprise des compétitions ou à défaut, de faire de la saison 2019-2020 une « saison blanche ».

Il est précisé que la Fédération française de football (FFF) s’est associée à l’argumentaire de la LFP.

Aux termes de son ordonnance rendue le 9 juin 2020, le juge des référés du Conseil d’Etat a notamment rappelé la chronologie suivante :

  • La loi du 23 mars 2020 a déclaré l’état d’urgence sanitaire et un décret du même jour a prescrit les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 ; ce régime est resté applicable jusqu’au 11 mai 2020, soit postérieurement à l’édiction des décisions du conseil d’administration de la LFP contestées ;
  • Dès le 13 mars 2020, le conseil d’administration de la LFP a décidé de suspendre les compétitions organisées par la Ligue puis un groupe au sein de la Ligue a travaillé à l’élaboration des conditions d’une éventuelle reprise des compétitions ;
  • Le 16 avril 2020, le comité exécutif de la FFF a pris la décision de prononcer la fin des compétitions pour le football amateur ;
  • Le 28 avril 2020, le Premier ministre a indiqué que « la saison 2019-2020 de sport professionnel, notamment celle de football, ne pourra pas reprendre » et le 30 avril 2020, la ministre des sports a précisé « qu’aucune compétition sportive ne pourra avoir lieu avant le mois d’août, y compris à huis clos ».

Sur la décision de mettre un terme définitif à la saison 2019-2020 :

Le juge des référés a également rappelé qu’à cette date, l’UEFA avait fait connaître aux fédérations nationales son souhait de voir les compétitions prendre fin au plus tard le 3 août 2020 et que c’est dans ce contexte des annonces gouvernementales d’une part, des contraintes du calendrier d’autre part et, au regard de la nécessité de préserver la santé de tous les acteurs des rencontres de football et de l’intérêt s’attachant à ce que les clubs disposent de la visibilité nécessaire pour gérer l’intersaison et organiser la saison 2020-2021 que le CA de la Ligue a pris la décision d’arrêter de façon définitive le championnat de Ligue 1.

C’est dans ces conditions que le juge des référés a considéré que le CA de la LFP, qui a pesé les avantages et les inconvénients d’une décision immédiate, n’a pas méconnu sa propre compétence ni entaché sa décision d’une erreur de droit (en se croyant lié à tort par une décision gouvernementale), de fait ou d’une erreur manifeste d’appréciation de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée.

Sur la décision de procéder à un classement du championnat de Ligue 1 pour la saison 2019-2020 :

Il est rappelé que la 28ème journée de championnat n’a pu intégralement être disputée.

Le CA de la LFP a décidé d’appliquer un indice de performance défini comme le quotient issu du rapport entre le nombre de points marqués et le nombre de matches disputés.

Choix d’arrêter un classement se fondant sur les rencontres déjà disputées :

Le juge des référés a rappelé qu’il incombait au CA de la LFP de déterminer les conséquences à tirer de l’interruption des championnats et que ce dernier a pu légalement faire le choix d’arrêter le principe d’un tel classement dans la mesure où 73 % des rencontres avaient pu être disputées de sorte que ce choix ne pouvait être regardé comme méconnaissant l’objectif d’équité et d’intégrité des compétitions sportives.

Choix des modalités de classement du championnat de Ligue 1 :

La solution choisie par le CA de la LFP, selon le magistrat, n’est pas de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision au motif que l’indice de performance retenu présente l’avantage de prendre en compte l’intégralité des rencontres disputées.

Le juge des référés ajoute que le CA de la LFP s’est borné à utiliser une méthode qui l’avait été antérieurement par la FFF pour les clubs amateurs de sorte que ce choix n’a pas été motivé par la volonté de pénaliser le club lyonnais, comme a cru devoir l’affirmer ce dernier.

N’en déplaise à Monsieur AULAS, l’Olympique Lyonnais est bien 7ème de la saison 2019-2020 de Ligue 1.

Etant utile de rappeler qu’il s’agit d’une décision en référé, avec effet immédiat et exécutoire, mais dont les mesures ont un caractère provisoire, c’est-à-dire non définitif, dans la mesure où ladite décision de référé est susceptible d’être remise en cause par le juge qui statuerait sur le fond de l’affaire.

S’agissant de la même décision du conseil d’administration de la LFP ayant relégué en Ligue 2 les clubs d’Amiens et Toulouse, le juge des référés du Conseil d’Etat a considéré que cette décision était entachée d’une erreur de droit de nature à créer un doute sérieux quant à sa légalité au motif que le CA de la LFP s’est basé sur la convention conclue entre la LFP et la FFF qui prévoit une Ligue 1 entre 18 et 20 clubs, alors même que cette convention prend fin le 30 juin 2020 et ne régit pas la saison 2020-2021.

La décision de reléguer les deux clubs précités est donc suspendue et le juge des référés a enjoint la LFP de réexaminer d’ici le 30 juin 2020 la question du format de la ligue 1 pour la saison 2020-2021.

Nul doute que la LFP et la FFF vont rapidement mettre en œuvre les conditions du déroulement de la saison 2020-2021 sur un format à 20 clubs de nature à justifier de plus fort la relégation des clubs d’Amiens et de Toulouse.

Ces batailles juridiques vont en tout état de cause laisser des traces dans les rapports entre la LFP, la FFF et certains clubs d’une part et, entre les clubs eux-mêmes d’autre part.

Clement Diaz Avocat